À Mons, certains événements misent sur la grandeur et la mise en scène. D’autres préfèrent la proximité, le plaisir du moment partagé et la découverte sans filtre. Le Festival Courtes Formes appartient clairement à cette seconde catégorie. Durant six jours, du mardi 18 au dimanche 23, L’Écho des Murs ouvre ses portes à une série de petites formes théâtrales, musicales et performatives. Trois spectacles de trente minutes par jour, des pauses au bar pour respirer, discuter, refaire le monde, et une atmosphère qui rappelle pourquoi on aime tant voir des artistes jouer tout près de nous. L’entrée est entièrement gratuite. La participation au chapeau permet simplement de soutenir celles et ceux qui se présentent sur scène.
Un festival qui va à l’essentiel
Le concept est d’une simplicité rafraîchissante. Neuf mini-spectacles, tous différents, tous autonomes. Le public navigue d’un univers à l’autre, sans hiérarchie, sans attente démesurée. Une forme courte, par définition, doit aller droit au cœur. C’est ce qui rend ces propositions si vivantes. On assiste à un geste artistique, souvent brut, parfois tendre, parfois déroutant, mais toujours sincère. Chaque jour fonctionne comme un trio de rencontres. Le public n’a qu’à se laisser guider.
Les spectacles de cette édition
- Le p’tit Joseph ouvre la marche avec la générosité propre à Joseph Collard. Son clown s’adresse à toutes et tous, et c’est le public qui décide ce qu’il veut lui demander. Ce rapport direct rappelle les grandes figures du clown contemporain, celles qui jouent avec le réel plutôt qu’avec des effets.
- Belgitude arrive ensuite avec un regard amusé et parfois piquant sur une Wallonie qu’on croit connaître. Maya De Waele et Benjamin Poignard agissent comme deux guides décalés, accompagnés par Olivier et Loris Douyez, pour un voyage où l’humour sert de carte routière.
- Secret prend une direction beaucoup plus intime. La création explore tout ce qui ne se dit pas, non pas par peur mais par certitude que personne ne comprendrait. Lara Cowez accompagne cette forme délicate où le silence prend autant d’importance que la parole.
- Crâne convoque Victor Hugo et sa phrase issue des Misérables. Toute l’anarchie est dans le gamin. Sous la direction de Hugues Chamart, une distribution énergique donne vie à un spectacle tendu, habité, presque musical dans sa manière d’alterner violence, fragilité et chaos intérieur.
- Peepshow, porté par Julien Vanbreuseghem, se présente comme une plongée dans une tête qui cogite beaucoup trop. C’est une sorte d’autopsie créative où les idées s’empilent, se mélangent, se questionnent à haute voix.
- Triptyque Il raconte l’histoire d’une femme, d’un homme et d’une ville. Daniel Decot compose une pièce qui ressemble à un film en mouvement, accompagnée par les voix et les présences d’Ariane Théry et de Raffaele Giuliani. Les chansons originales ajoutent une note presque urbaine à cet entre-deux amoureux.
- Leelou et Loris apportent une respiration musicale. Elle chante, lui façonne le paysage au clavier. L’ensemble touche à quelque chose de très simple et très vrai, presque comme une bande-son écrite pour les fins de soirée.
- L’Orchestre d’accordéons de l’École ARTS, guidé par Olivier Douyez et accompagné par Marco Taillebuis au saxophone, propose un moment collectif lumineux. L’accordéon, souvent sous-estimé, prend ici une ampleur surprenante.
- Enfin, Olivier Bonjour clôture avec des textes de Paul K, de Janusz Korczak et de Jonathan Carrier. Sa présence donne à entendre des mots qui résonnent longtemps après la sortie du lieu. Une forme plus épurée, mais d’une intensité qui tient sans artifices.
Un rendez-vous qui privilégie le partage
Le Festival Courtes Formes fonctionne parce qu’il ne cherche pas à impressionner. Il cherche à rassembler. Même dans sa gratuité, il reste exigeant et sincère. Le public revient souvent d’un jour à l’autre parce qu’il sait qu’il trouvera toujours quelque chose de différent. On rencontre des artistes, on croise des habitués, on discute avec des inconnus autour d’un verre. C’est une proposition qui s’inscrit parfaitement dans l’esprit montois. Une envie de culture vivante, proche, accessible.
Conclusion
Durant six jours, L’Écho des Murs devient un petit théâtre du possible. Chaque soirée offre trois portes d’entrée vers des univers très différents. Ensemble, ces neuf formes courtes racontent quelque chose de plus large : la vitalité des artistes locaux, la curiosité du public, et le plaisir simple d’assister à un moment unique. Le festival n’attend plus que celles et ceux qui aiment être surpris.
Les portes sont ouvertes. À vous de pousser la vôtre.